Solidarité. Une consultation citoyenne pour les services publics

KAREEN JANSELME

LUNDI, 22 JANVIER, 2018
L’HUMANITÉ

Résultat de la collaboration entre le collectif et les organisations partenaires, le contre-questionnaire établi par la Convergence nationale se veut « sans tabou » sur l’efficacité, l’accessibilité et la qualité que devraient recouvrir les services publics. Lydie Lecarpentier/REA

Résultat de la collaboration entre le collectif et les organisations partenaires, le contre-questionnaire établi par la Convergence nationale se veut « sans tabou » sur l’efficacité, l’accessibilité et la qualité que devraient recouvrir les services publics. Lydie Lecarpentier/REA

La Convergence nationale des services publics organise des débats et met en ligne un questionnaire pour contrer l’offensive gouvernementale de créer un service public déshumanisé hyperconnecté.

«La machine à détruire le service public est en marche », constate, effaré, Denis Turbet- Delof, porte-parole de Solidaires. En juin 2017, quand Gérald Darmanin, le ministre de l’Action et des Comptes publics, a lancé une grande consultation pour « dessiner le visage et les contours des services publics d’aujourd’hui et de demain », les syndicats ont joué le jeu et rencontré le ministre. Mais, dès la rentrée de septembre, il était clair qu’ils n’étaient « pas du tout sur la même longueur d’onde », remarque Denis Turbet-Delof, qui précise : « Le ministre avait une approche purement interne sur le ressenti des conditions de travail, mais aucune réflexion sur les services publics, sur la mission des agents. »

Le 26 septembre, Édouard Philippe lançait son projet CAP 22 (comité action publique 2022), en évitant soigneusement de convier dans les discussions à venir les professionnels impliqués. Quelques auditions étaient prévues avec les syndicats de la fonction publique, mais l’ensemble du projet était confié à un groupe d’experts entrepreneurs. Au programme : économies de budget, développement à outrance du numérique. Avec le secteur privé en embuscade.

L’objectif du gouvernement : supprimer 120 000 emplois…

« Même France Stratégie, la “chose” du premier ministre, affirme que la France n’est pas suradministrée », reprend Denis Thomas, pour la FSU, qui alerte sur l’objectif annoncé du gouvernement de supprimer 120 000 emplois dans la fonction publique, et sur la baisse de la dépense publique : « Le projet de loi de finances 2018 se caractérise par une défiscalisation sans précédent du capital très favorable aux plus fortunés, mettant à mal la redistribution des richesses et aggravant les inégalités. » Fini le temps où l’on saluait « l’amortisseur de crise » qu’avait constitué notre système après 2008. Place à de nouveaux modèles, sous couvert d’économies nécessaires, dénonce l’association Attac. « Macron veut changer le pays en deux ans, en réalisant ce qu’a fait Thatcher, mais dans un autre style, dénonce Annick Coupé, secrétaire générale d’Attac. En s’attaquant aux services publics, il veut éradiquer ce qui reste de solidarité dans le pays. La ministre Muriel Pénicaud a été symboliquement nommée DRH de l’entreprise France par le congrès des DRH. Et le gouvernement explique ces choix par l’absence d’argent dans les caisses, mais cela est dû à son choix en matière de politique fiscale. Le gouvernement ne lutte pas contre l’évasion et l’optimisation fiscales. Cela permettrait pourtant de récupérer de l’argent pour des services publics de qualité. »

Mais où sont passés les forums publics régionaux promis pour débattre des nouveaux services publics du XXIe siècle ? Agents et usagers sont censés répondre à une grande consultation sur Internet, mais qui est au courant ? Le rapport des experts est attendu pourtant dès le mois prochain. Pour Michel Jallamion, président de la Convergence nationale des services publics, « les usagers sont les premiers financeurs des services publics. Ils ont donc des choses à dire et à faire ». Forte de ses organisations, collectifs, associations d’usagers, élus, la Convergence lance la riposte en créant sa propre contre-consultation citoyenne à travers un questionnaire « sans tabou » sur l’efficacité, l’accessibilité, la qualité, les champs que devraient recouvrir les services publics. Des débats seront organisés dans les territoires en prévision d’un rendez-vous national en mars. Rencontré, Philippe Laurent (UDI), secrétaire général de l’Association des maires de France (AMF) et président du conseil supérieur de la fonction publique territoriale, est prêt à participer aux échanges, conscient des impasses de CAP 22. Dans un même esprit, le PCF organise le 3 février des états généraux du progrès social. « Le but est aussi de favoriser les convergences de luttes pour les services publics, la protection sociale, l’industrie, le travail, l’emploi, le logement, pour des services publics rénovés qui répondent aux besoins de la population et non de la finance », détaille Isabelle Mathurin, responsable du secteur services publics du PCF, qui entend bien relayer le questionnaire de la Convergence et les propositions de son manifeste. « En 2018 va se jouer un choix de société que l’on doit prendre rapidement », conclut Michel Jallamion.

Journaliste, rubrique social

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